Nos anciens - Aude Piette: podcasts et créations sonores

- Jérôme Coupé

Aude piette gare poix

Conversation avec Aude Piette autour de son parcours, ses différentes vies professionnelles et sa découverte de l'univers des podcasts et de la création sonore.

Bonjour Aude. En plus d'un master en sciences politiques, tu es entre autres diplômée de l'IAD en production de concerts et management d'artistes, tu as longtemps travaillé dans l'horeca et, aujourd'hui, tu réalises des créations sonores et des podcasts. Tu nous racontes ?

En sortant de mes secondaires, j'ai fait un master en Sciences Politiques à l'ULB, parce que cela me semblait être des études assez polyvalentes. Ensuite, j'ai travaillé pendant un an au Canada et en Hollande pour apprendre le néérlandais et l'anglais. En rentrant en Belgique, j'enseigne les langues à mi-temps et je prends un autre mi-temps comme chargée de projets et de communication dans une association culturelle.

J'ai 28 ans, j'habite Bruxelles, je vais régulièrement voir mes parents dans les Ardennes. Cette année-là, ma maman est atteinte d'un cancer contre lequel elle se battra pendant un an avant de mourir. Mes trajets en train vers Poix-Saint-Hubert et l'hôtel-restaurant familial se font de plus en plus nombreux pour aller la voir.

Lors d'un de ces allers-retours vers mon village natal, cela me tombe dessus comme une évidence: j'arrête tout le reste et je décide, un peu sur un coup de tête, de reprendre l'hôtel et le restaurant familial avec ma sœur.

Aude en noir et blanc

Aude en noir et blanc

C'est plutôt radical comme changement de cap, en effet.

Ma soeur et moi, c’est un peu un choix que nous faisons par devoir. Ce n'est pas forcément notre choix de cœur, mais on se dit toutes les deux qu'il faut absolument le faire à notre manière.

La carte du restaurant “Les gamines” devient locavore, avec un choix de bières et de produits régionaux. On crée un concept de table conviviale épicurienne et un coworking baptisé “Gare!” avec comme projet d'investir l'ancienne gare du village pour la transformer en espace culturel et citoyen.

Là ... je sens qu'il faut que je me forme. L'horeca, je connais. Je travaille dans cet hôtel-restaurant depuis toute petite. L'événementiel, les artistes et les concerts par contre ... .

Je trouve cette formation d'un an en "Organisation de concerts et management d’artistes" à l'IAD et je fonce. C'est vraiment une année très riche, pendant laquelle je peux appliquer tout ce que j'apprends en communication, en management et en organisation d’événements, aussi bien dans l'Horeca que dans les aspects plus culturels et citoyens du projet.

Pendant 10 ans, je me consacre donc à cet hôtel, au restaurant et au projet "Gare!", toujours en faisant des allers-retours Bruxelles-Ardennes en train ou en voiture.

C’est là que les podcasts entrent dans ma vie. J'en écoute beaucoup. A l'époque, l'offre est beaucoup plus réduite et le niveau de production est encore relativement artisanal. 

Après ces dix années, j’ai besoin d’autre chose, l’aventure me tente et je décide de tout quitter à nouveau pour me lancer les podcasts et la création sonore. 

"Au pays de Nulle Part": un podcast dédié à la ruralité et à ceux qui y vivent ... ou pas.

"Au pays de Nulle Part": un podcast dédié à la ruralité et à ceux qui y vivent ... ou pas.

On en arrive à celle de tes vies que je connais un peu mieux. J'imagine que, pour créer ce podcast, tu appliques ta recette habituelle: une bonne idée, quelques formations, beaucoup de travail et une grosse envie de bien faire ?

Oui, c'est ça, il y a comme un pattern en effet (rires). Après quelques formations courtes liées au son et au podcast (mixage, montage, prise de son, interviews, etc.),  je me lance dans la création du podcast ’"Au pays de nulle part" dédié à la ruralité.

Tous les 15 jours et pendant 30 épisodes, je pars à la rencontre de personnes qui vivent entre ville et ruralité: certains font le choix de quitter la ville ou y emménagent, tandis que d'autres voyagent entre ville et campagne, etc.

J'adore cette expérience. Partir à la rencontre des gens, créer, monter, mixer, produire quelque chose que d'autres peuvent écouter et aborder des sujets qui me touchent. Je prends confiance.  J'ai l'impression d'avoir trouvé mon domaine. Je peux mélanger la création, le son, ma passion pour les rencontres et les gens, ainsi qu'un aspect technique que j'aime beaucoup.

J'ai terminé ce premier projet en plein COVID et j'ai ensuite co-réalisé "Contretemps" avec Alice Khol. Cette création sonore est née du fait que ma belle fille a eu 16 ans pendant le confinement et n'a pas pu fêter son anniversaire avec ses copines. Je lui ai proposé de l'interviewer régulièrement, elle et quelques amies, pour raconter ce qu'elles vivaient et comment elles voyaient l'amour, l’amitié, etc. Ce documentaire sonore met en scène la vie de 5 ados pendant le coronavirus à travers leurs récits, des sons enregistrés en ville ou à la maison et des slams déclamés par Zoé Mabille. 

Le projet a eu son petit succès: sélection à Brest et beau parcours sur les radios. J'ai ensuite travaillé avec Jérôme Mabille sur "Francis", un autre projet de documentaire sonore produit par l’ACSR dans le cadre du fonds “Empreinte”. Le principe est d’emmener les auditeurs à la rencontre d'un homme qui fait un métier particulier et que l'on découvre petit à petit. 

Interview en pleine nature pour "Francis"

Interview en pleine nature pour "Francis"

En parallèle, j'ai travaillé sur quelques commandes:

  • Glaïeuls Paradise, un podcast de rencontre avec des artistes avant leurs concerts dans des lieux intimistes.
  • Highlight avec IAD Music qui emmène les auditeurs à la rencontre des univers musicaux de trois artistes émergents.

Actuellement, avec mon associée que j’ai rejointe chez PAF, je travaille sur la réalisation d'un nouveau podcast en 9 épisodes sur le thème des familles recomposées et sur un nouveau projet de création sonore. Nous réalisons aussi beaucoup d'audio-descriptions pour le cinéma. 

En plus du marché belge, des opportunités commencent à se présenter à l’international.

Plein de chouettes projets! Est-ce que, pour terminer, tu aurais un conseil ou quelque chose à transmettre aux jeunes générations ?

Si je suis bien où je suis maintenant, c'est surtout parce que je me suis laissé la liberté et le temps d'expérimenter, de faire des choses très différentes, de me connaître, de comprendre ce que j'aimais et ce que j'aimais moins, de faire des rencontres, de me tromper parfois, etc. Mon conseil aux étudiantes et aux étudiants : n’ayez pas peur d'essayer, de chercher, ne vous laissez pas enfermer dans une case.

L'échec ou la réussite, pour moi cela n'existe pas. On apprend de l'un comme de l'autre. Ne vous mettez pas trop de pression. N'ayez pas peur de faire des expériences différentes. Cela vous permettra de mieux vous connaître et de vous fabriquer une vie professionnelle qui vous convient et qui vous rend heureux.